« Parce que leur histoire ne s’était pas achevée au bon endroit, au bon moment,
parce qu’ils avaient contrarié leurs sentiments,
il était écrit, me semble-t-il, qu’Eugène et Tatiana se retrouvent dix ans plus tard,
sous terre,
dans le Météor, ligne 14 (violet clair), un matin d’hiver.
Il était neuf heures moins le quart. »
De quoi s’agit-il ?
Un peu plus d’un an après le formidable Les Petites Reines, Clémentine Beauvais a publié, à la rentrée d’automne 2016, Songe à la douceur, un roman entièrement en vers (oui, vous avez bien lu !) inspiré de l’Eugène Onéguine d’Alexandre Pouchkine. Changement d’univers complet ici. Je tente un résumé en vers de son roman, à ma façon sans doute un peu bancale :
Un été, en banlieue parisienne. Une banale maison où vivent, avec leur mère, 2 sœurs :
Tatiana, 14 ans, ne connaît le bonheur
qu’à travers les histoires des grandes héroïnes des livres que, recluse dans sa chambre, elle dévore.
Sa sœur aînée, Olga, 17 ans, est plus terre à terre, elle sort.
Elle aime Lensky, le fils du voisin,
et celui-ci le lui rend bien ;
Arrive Eugène, cet ami
Qui s’ennuie.
Pendant qu’Olga et Lensky vont goûter à des plaisirs charnels,
Eugène entretient la jeune demoiselle.
Prête pour l’amour, Tatiana fond pour le jeune homme.
Son cœur et le sien parleraient-ils le même idiome ?
Ni une ni deux, elle lui écrit une longue missive
Mais son absence soudaine la laisse pensive.
Dix ans plus tard, ils se retrouvent dans le métro.
Pourra-t-il naître enfin, cet amour nouveau ?
Voilà, je m’arrête là. Cela vous donnera une idée mais c’est bien sûr loin d’être du niveau de Songe à la douceur !
Quoi qu’il en soit, ce beau roman traite des amours adolescentes, des éventuelles secondes chances à l’âge adulte qui se confrontent à de nouvelles donnes… Dix ans après leur première rencontre et leurs débuts ratés, Eugène et Tatiana peuvent-ils repartir de zéro, comme si de rien n’était ?
A qui s’adresse-t-il ?
Songe à la douceur est présenté comme un roman « jeune adulte ». Si l’on aime la langue française, c’est encore mieux ! J’ai ainsi beaucoup apprécié lire le texte dans ma tête, entendre sa musique.
Pourquoi faut-il l’avoir dans sa bibliothèque ?
Songe à la douceur est un roman complètement bluffant, tant la prouesse d’écriture est belle. Il n’y avait que Clémentine Beauvais (dont le blog est à retrouver ici) pour oser proposer un tel livre, qui plus est en littérature jeunesse. Et les Editions Sarbacane pour l’accepter ! L’auteure se paie même le luxe de poursuivre ses remerciements sous la même forme. Et ce n’est pas tout : elle va au-delà du rôle classique du narrateur pour devenir le troisième personnage du roman. Elle intervient dans le récit pour donner son avis, faire état de ses doutes quant à l’exactitude de ses souvenirs, et même discuter avec Tatiana lors de son choix final ! Petit bémol cependant : la forme m’a tant impressionnée qu’elle m’a parfois détourné du sens du texte,
Malgré la contrainte formelle que s’est imposée Clémentine Beauvais, son roman fait preuve d’une grande liberté, comme en témoignent les quelques calligrammes disséminés au long du texte :
Un très beau roman que je conseille vivement !