« Les gens restaient souvent leur vie entière sur la branche où ils étaient nés. Ils y trouvaient un métier, des amis… De là venait l’expression « vieille branche » pour un ami de longue date. On se mariait avec quelqu’un d’une branche voisine, ou de la région. Si bien que le mariage d’une fille des Cimes avec un garçon des Rameaux, par exemple, représentait un événement très rare, assez mal vu par les familles. C’était exactement ce qui était arrivé aux parents de Tobie. »
De quoi s’agit-il ?
Tobie Lolness est un merveilleux roman fantastique et d’aventures en deux parties du Français Timothée de Fombelle. Le tome 1, La vie suspendue, a paru en 2006, et a notamment reçu le Grand Prix de l’Imaginaire l’année suivante. Tobie Lolness est un jeune garçon qui ne mesure pas plus d’un millimètre et demi. Il appartient au peuple qui habite le grand chêne depuis la nuit des temps et vit avec ses parents, Sim, scientifique respecté, et Maïa, descendante d’une famille richissime qu’elle a quittée par amour. D’abord résidente des Cimes, la partie supérieure de l’arbre, la famille Lolness est un jour contrainte à l’exil dans les Basses Branches, près de la frontière : le père refuse de divulguer le secret d’une invention révolutionnaire qui permet de transformer la sève de l’arbre en énergie motrice. Quelques années plus tard, c’est Tobie qui doit fuir, traqué par les siens…
À qui s’adresse-t-il ?
Ce roman peut être lu avec un grand plaisir à partir de 12-13 ans, l’âge qu’a Tobie au début du livre.
Proche du roman d’apprentissage de par le fait que l’on suive Tobie sur plusieurs années, depuis ses 7 ans, qu’il doive faire face à différentes épreuves qui le font mûrir, Tobie Lolness permet à l’enfant de cet âge, en pleine construction, de se poser la question de l’individu qu’il souhaite devenir.
Le roman offre une galerie de personnages aussi variée que l’est la nature humaine : depuis les véritables salauds, les menteurs, les traîtres, les suiveurs, les simples d’esprit, jusqu’aux hommes bons, généreux, loyaux, y compris ceux qui seraient prêts à se sacrifier pour autrui. Tobie, lui, est présenté comme un véritable « héros » (un peu comme le personnage de Jonas dans Le Passeur, de Lois Lowry) : courageux, malin, fidèle en amitié et très empathique, il parvient à se tirer des mauvais pas en suivant les leçons que son père lui a transmises, notamment « les choses ne changent pas pour rien ». Lors de sa traque, Tobie découvre le vrai visage de ceux qui l’entourent : ceux à qui il peut faire confiance – qui peuvent se compter sur les doigts d’une main – et ceux, qui composent la grande majorité, qui seraient prêts à tout pour de l’argent, du prestige, de la reconnaissance…
Pourquoi faut-il l’avoir dans sa bibliothèque ?
En plus d’être un formidable roman d’aventures aux multiples rebondissements tous plus inattendus les uns que les autres, Tobie Lolness invite aussi à la réflexion.
La préoccupation de Sim Lolness quant à la sauvegarde de l’arbre, ainsi que les interrogations sur la possibilité d’une autre vie en dehors de celui-ci, renvoient aux questionnements et craintes qui agitent notre société : « Les feuilles étaient rares, alors que l’automne n’avait pas commencé. Le fameux trou dans la couche de feuilles découvert par le professeur Lolness n’était pas une fantaisie de vieux fou. Le réchauffement, les risques d’inondation pendant l’été, le ravinement de l’écorce : la vraie menace était là. Tobie comprenait enfin l’obsession de son père. » On ressent un vrai engagement écologique dans ce texte.
Notre vision de l’étranger est aussi questionnée ici, à travers l’image qu’a le peuple de l’arbre de celui de l’herbe, les Pelés.
Il faut enfin saluer les illustrations réalisées par François Place, qui aident vraiment à se représenter des situations que l’esprit n’a jamais eu à imaginer (voir ci-dessous).
A quoi ressemble la vie quand on ne mesure que quelques millimètres et que l’on doit faire face à des fourmis de combat, des charançons (dont j’ai découvert l’existence à l’occasion de cette lecture !), des moustiques (dont une simple piqûre viderait de son sang quiconque sur l’arbre) ? Quand on vit sur un arbre où les gouttes de pluie forment des lacs dans lesquels il est bon de se prélasser et où un festin se compose de chips de poux et de pâté de sauterelle…?
C’est à tout cela et bien plus encore que nous convie Timothée de Fombelle dans ce très beau livre.
J’ai bien aimé ce roman mais sans plus. Il m’a manqué une intrigue « principale » dans cette histoire, qui est finalement plus une succession d’intrigues secondaires (c’est comme ça que je l’ai vécu en tout cas). Et concernant les illustrations, pourquoi sont-elles en noir et blanc, ça ne s’y prêt pourtant pas. Pas un souvenir impérissable de mon point de vue, donc.